En 2021, les femmes gagnaient 500 euros net de moins par mois que leurs homologues masculins (tous temps de travail confondus) (Source : Observatoire des inégalités). Si les écarts de salaire entre les femmes et les hommes ont incontestablement diminué ces dernières années, des inégalités notables persistent encore dans toutes les strates de la sphère professionnelle.
Mais comment expliquer ces disparités ? Face aux timides avancées des organisations en matière d’égalité salariale, la Sécurité économique et sociale (SES) pourrait-elle contribuer à atténuer ce clivage ?
Inégalités salariales hommes-femmes : où en est-on ?
Au cœur du débat public depuis des décennies, les inégalités salariales entre les femmes et les hommes représentent un enjeu sociétal majeur qui soulève des questions fondamentales d’équité, d’égalité et de parité dans le monde du travail. Malgré des progrès indéniables, ces écarts de revenus restent, encore aujourd’hui, très marqués.
Des avancées notables…
Dans les années 1960, alors que la différence de salaire entre les femmes et les hommes s’élevait à presque 60 % (source : Observatoire des inégalités), des mouvements féministes ont commencé à lever le voile sur ces inégalités criantes.
Puis, en 1972, la première loi pour l’égalité professionnelle est promulguée, déclarant que « tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes ».
En 1995, le revenu net des femmes dans le secteur privé était de 34 % inférieur à celui des hommes (Source : Insee). Aujourd’hui, selon les dernières données disponibles, l’écart s’élevait à 24,4 % en 2021 (15,5 % en équivalent temps plein), soit une baisse de 10 % en près de 25 ans (Source : Insee).
Ces avancées sont en partie liées à la promulgation de nombreux textes de loi ayant contribué à faire évoluer les mentalités.
Parmi les grandes évolutions législatives en matière d’égalité salariale, on peut notamment citer :
- La loi du 13 juillet 1983 (dite loi Roudy) : l’une des mesures phares de cette loi est la mise en place du RSC (rapport de situation comparée). Ce rapport vise à évaluer et à comparer, chaque année, les conditions générales d’emploi des femmes et des hommes dans les entreprises, avec la mise en place d’actions pour supprimer les inégalités mises en lumière.
- En 2001, la loi Génisson crée l’obligation de négocier sur l’égalité professionnelle au niveau de l’entreprise et des branches.
- En 2011, la loi Copé-Zimmermann instaure des quotas progressifs relatifs à la présence de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance. Aujourd’hui, le taux de féminisation doit atteindre 40 % dans ces instances au sein des entreprises moyennes et de plus de 500 salariés.
- En 2014, la loi pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes impose une série de mesures phares, telles que l’interdiction d’accès aux contrats de commande publique pour les organisations ne respectant pas les exigences d’égalité professionnelle ; le dépôt d’un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle auprès de la Direccte pour les entreprises de plus de 50 salariés ; la réforme du congé parental…
- En 2015, la loi relative au dialogue social instaure une obligation de représentation équilibrée au sein des instances représentatives du personnel dans les sociétés.
- En 2018, la loi pour la Liberté de choisir son Avenir Professionnel a mis en place un index visant à mesurer et à corriger les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes au sein des entreprises de plus de 50 salariés. Cet index est noté sur 100 points et se calcule grâce à 4-5 indicateurs (augmentation, promotion, parité dans les plus hauts postes…)
- La loi du 24 décembre 2021 impose des quotas de féminisation dans les postes de direction des sociétés de plus de 1 000 salariés. Le palier est fixé à 30 % de femmes parmi les cadres dirigeants au 1er mars 2026, avec un objectif final de 40 % au 1er mars 2029.
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… mais des disparités persistantes
Bien que des progrès aient été réalisés depuis la première loi pour l’égalité salariale il y a près d’un demi-siècle, les disparités de revenus basées sur le genre ont la vie dure et la marge de progression des entreprises est encore forte. Avec un salaire moyen annuel de 24 640 euros net pour les hommes, contre 18 630 euros net pour les femmes, l’écart salarial hommes-femmes se monte, en 2023, à 500 € par mois( source : Observatoire des inégalités).
Par ailleurs, malgré des inégalités décroissantes ces dernières années, la France se situe encore au-dessus de la moyenne de l’Union européenne (12,7 % en équivalent temps plein, Source : Eurostat).
En outre, le dernier index de l’égalité professionnelle réalisé le 1er mars 2023 révèle une note moyenne de 88/100, contre 86/100 en 2022 et 82/100 en 2020. Depuis sa mise en place en 2019, cet indicateur est en constante progression. Cependant, si ces chiffres sont encourageants, il faut toutefois souligner que 3 entreprises sur 10 soumises à l’obligation de calculer cet index ne respectent pas ces règles. En outre, seules 2 % des sociétés ont un score de 100/100 et 77 employeurs ont une note inférieure à 75/100 depuis 4 ans.
Quelles sont les causes réelles des inégalités salariales hommes-femmes ?
Les inégalités de salaire hommes-femmes sont la somme de plusieurs facteurs sous-jacents, encore difficiles à identifier avec précision. D’après une enquête menée par l’Insee en 2020, plus de 40 % de l’écart salarial s’explique par une inégalité du temps de travail et deux tiers seraient liés à l’emploi occupé.
Ainsi, à temps de travail et à postes comparables (même profession et même employeur), l’écart salarial hommes-femmes serait de seulement 4,3 % en 2021 (contre 24,4 % sans prise en compte de ces facteurs, source : Insee).
Voici quelques-unes des causes des inégalités salariales liées au genre :
Le temps de travail
En 2021, les femmes ont cumulé un volume de travail de 10,6 % inférieur à celui des hommes (source : Insee). Par ailleurs, elles sont trois fois plus souvent à temps partiel que les hommes (27 % contre 8 %).
Des métiers et secteurs genrés
Les inégalités salariales hommes-femmes s’expliquent également par une forte ségrégation professionnelle. Les filières techniques et scientifiques restent, à l’exception des études de santé, très masculines. À titre d’exemple, en 2020-2021, 71 % des inscrits dans des formations d’ingénieur étaient des hommes.
Les femmes sont encore majoritaires dans des métiers pénibles, à faible rémunération, et souvent peu valorisés. Les employés de maison, les aides à domicile, les aides ménagères et les assistantes maternelles sont, à plus de 95 %, des femmes (source : Oxfam).
Une sous-représentation des femmes dans les postes les plus rémunérateurs
Alors que les femmes sont surreprésentées dans les postes à bas salaires (elles occupent 55 % des emplois autour de 1 300 € net mensuels), elles sont sous-représentées dans les postes à responsabilité. En effet, seul un tiers des effectifs sont des femmes pour les postes rémunérés au-delà de 4 010 € net mensuels et 22 % pour les salaires supérieurs à 9 602 € net mensuels (sources : Insee & Vie publique).
Ce « plafond de verre » (c’est-à-dire les freins “invisibles” auxquels les femmes se heurtent lors de leur évolution dans l’échelle hiérarchique) est une autre cause majeure des écarts de revenus entre les genres.
Par ailleurs, les disparités salariales sont d’autant plus marquées dans les salaires les plus élevés. En équivalent temps plein, les 10 % des femmes les moins bien rémunérées ont un salaire maximum inférieur de 5 % à celui de leurs homologues masculins (1 336 euros contre 1 400 euros). Tandis que le salaire minimum des 10 % des femmes les mieux payées est de 17 % moins élevé que celui des hommes (3 577 euros contre 4 317 euros) (Source : Observatoire des inégalités).
La vie familiale
La vie personnelle et familiale joue également un rôle dans les écarts de revenus hommes-femmes. En effet, les femmes sont plus nombreuses que leurs collègues masculins à mettre leur carrière en pause ou à réduire leur temps de travail pour des raisons familiales, notamment à la naissance d’un enfant. En 2020, 81 % des mères en couple étaient en activité contre 96 % des pères (Source : Insee).
La rémunération d’une salariée est par ailleurs de 21 % inférieure à celle d’un homme quand elle a deux enfants. Ce chiffre grimpe à 31 % quand elle a trois enfants ou plus (Source : Insee).
Des discriminations salariales
Si l’écart de rémunération hommes-femmes semble donc avant tout imputable aux choix de parcours professionnels et au temps de travail, il est impossible d’ignorer les causes discriminatoires et les stéréotypes de genre qui persistent encore, voire qui augmentent.
En 2019-2020, 22 % de femmes déclarent avoir subi des discriminations, soit une hausse de + 8 points par rapport à 2008-2009. Près de la moitié d’entre elles (47 %) dénoncent par ailleurs une discrimination pour motif sexiste (contre 28 % en 2008-2009).
Le sexisme est ainsi devenu la cause de discrimination principale pour les femmes, devant la couleur de peau, l’origine et la nationalité. (Source : Insee)
Ces discriminations peuvent s’imprégner dans tous les pans de la vie professionnelle : l’accès à la formation, la promotion, les tâches à accomplir, les responsabilités… Autant de facteurs qui influent directement sur le montant du salaire.
Ces causes multifactorielles génèrent aussi des différences importantes dans le niveau des retraites. En 2020, l’écart de pension moyenne de droit direct entre les femmes et les hommes était de 40 %. (Drees, 2022)
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Comment la Sécurité économique et sociale peut-elle contribuer à réduire les inégalités salariales hommes-femmes ?
La Sécurité économique et sociale (SES) propose d’extraire une portion des revenus générés par les entreprises, pour la redistribuer de façon égalitaire à l’ensemble des acteurs économiques (des travailleurs indépendants aux petites, moyennes et grandes entreprises).
Ce versement prendra la forme d’une allocation unique, fixe et mensuelle, par emploi en équivalent temps plein. Cette dernière sera donc financée directement par les entreprises, selon un pourcentage fixé à hauteur de leur chiffre d’affaires.
Vers une société plus égalitaire
Avec cette allocation emploi, la SES aspire à créer des conditions salariales plus égalitaires, en garantissant à chaque travailleur un socle de revenus minimum et inconditionnel, quels que soient son secteur d’activité, son poste, son métier, son parcours professionnel…
La Sécurité économique et sociale cantonne ainsi les écarts salariaux à la partie non mutualisée de l’économie et ouvre la voie à une société plus égalitaire, encourageant des pratiques organisationnelles plus équitables et plus transparentes.
Plus d’opportunités professionnelles
Comme nous l’avons vu, une grande majorité des inégalités salariales hommes-femmes sont liées à l’emploi occupé, au plafond de verre et à la ségrégation des filières.
Grâce au versement d’une allocation fixe à chaque employeur pour chaque emploi, la Sécurité économique et sociale encouragera les organisations à recruter davantage. Cette diversification et multiplication des offres permettra d’aller au-delà du plein emploi et de promouvoir l’emploi choisi. De cette manière, chaque individu pourra se tourner vers un métier aligné à ses attentes en termes de sens, de rémunération et de conditions de travail.
En outre, avec la SES, les salariés auront aussi accès à un plus large choix de postes au sein même de leur entreprise. La mobilité interne et l’évolution professionnelle seront donc facilitées, ce qui pourra directement contribuer à briser le plafond de verre qui limite actuellement l’accès des femmes aux postes les mieux rémunérés.
De plus, avec la mise en place d’une allocation emploi identique pour toutes les sociétés, les métiers actuellement moins rémunérateurs seront mieux payés. La reconversion professionnelle sera donc, elle aussi, plus facilement envisageable, ce qui devrait participer à la déségrégation des filières dites « masculines ».
Enfin, les employeurs pourront instaurer des rémunérations plus attractives, ce qui agira directement sur la revalorisation de certains métiers féminins perçus comme précaires.
Un retour à l’emploi facilité
Comme mentionné précédemment, 40 % de l’écart salarial entre les femmes et les hommes s’expliquent par une inégalité du temps de travail, en grande partie liée à l’arrêt d’activité de nombreuses femmes à la naissance de leurs enfants.
Grâce au socle financier proposé aux entreprises par la SES, celles-ci disposeront de plus de latitude dans leur politique d’embauche. Elles pourront ainsi plus facilement recruter des femmes n’étant plus, ou peu opérationnelles après avoir marqué une pause dans leur carrière pour des raisons familiales.
Les employeurs auront également plus de ressources pour investir dans la formation et dans la montée en compétences des femmes à leur retour à l’emploi.
Enfin, une partie de ce capital pourra être allouée à la mise en place de dispositifs destinés à soutenir l’emploi des mères travailleuses (garderie d’entreprise, congés maternité et paternité prolongés, horaires flexibles…).
La démocratisation de l’entrepreneuriat féminin
L’absence de parité dans le monde professionnel ne se limite pas seulement au salariat, mais se manifeste aussi dans la sphère entrepreneuriale. En 2021, seuls 32 % des entrepreneurs étaient des femmes, selon le dernier baromètre Infogreffe.
Une étude réalisée par l’Adie révèle également que l’accès au financement est le premier frein rencontré par les femmes au moment d’entreprendre : elles se verraient en effet refuser des prêts deux fois plus souvent que les hommes.
L’allocation emploi universelle proposée par la SES sera versée à tous les salariés mais aussi aux travailleurs indépendants et entrepreneurs. Ce dispositif contribuera ainsi à lever les freins financiers rencontrés par les porteuses de projet et facilitera de ce fait l’accès à l’entrepreneuriat pour les femmes.
En définitive, la SES peut donc directement estomper les causes des écarts de rémunération hommes-femmes offrant, in fine, une réponse novatrice et impactante face à ce défi sociétal majeur.
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Photo de Tim Mossholder sur Unsplash