Indicateur clé pour connaître l’évolution des salaires des fonctionnaires en France, la valeur du point d’indice a subi, l’année passée, une nouvelle revalorisation afin d’augmenter la rémunération des agents publics. Cependant, dans le contexte inflationniste actuel, cette hausse du point d’indice est-elle réellement satisfaisante ? Permet-elle d’atteindre des salaires suffisants et d’octroyer assez de pouvoir d’achat aux acteurs de la fonction publique ? Analysons ici l’impact réel de cette mesure qui soulève des questions récurrentes, au cœur de nombreux débats.
Qu’est-ce que le point d’indice de la fonction publique ?
Le point d’indice est un outil utilisé par le gouvernement pour définir le montant du salaire brut mensuel des employés de la fonction publique : fonctionnaires, magistrats, militaires, agents contractuels…
Pour déterminer la rémunération mensuelle de base d’un fonctionnaire, il faut en effet multiplier la valeur du point d’indice par l’indice majoré attribué à l’agent concerné.
L’indice majoré (IM) est spécifique à chaque fonctionnaire et fixé en fonction de son grade, de son échelon, de son ancienneté et de son cadre d’emploi. Historiquement, les indices majorés dans la fonction publique varient entre 208 et 835. Toutefois, depuis le 1er janvier 2024, pour éviter que les fonctionnaires ne perçoivent un salaire en-dessous au SMIC, ils doivent être rémunérés, a minima, sur l’indice majoré 366, ce qui correspond à un salaire brut d’environ 1 800 € par mois pour un temps plein (Source : Service-public.fr).
La valeur annuelle brute du point d’indice est quant à elle définie par le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié, relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l’État, des personnels de collectivités territoriales et d’établissements publics d’hospitalisation (Article 3). La valeur du point d’indice est réévaluée chaque année pour s’aligner sur le contexte économique et sur l’augmentation du coût de la vie.
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Quelle est la valeur du point d’indice en 2025 ?
Depuis sa mise en place en 1983, le point d’indice a subi des augmentations régulières, à l’issue de négociations entre le gouvernement et les représentations syndicales.
En 2010, l’État a fait le choix de geler la valeur du point d’indice, en raison de l’impact de la crise financière mondiale de 2007-2008. En conséquence, les salaires des fonctionnaires n’ont pas évolué pendant 6 ans. Puis, en 2016, le dégel du point d’indice a finalement été annoncé par le gouvernement. S’ensuivit alors une augmentation de 1,2 % de la valeur du point d’indice en l’espace de deux ans, qui a ensuite stagné à 4,68 € de 2017 à 2022, avant d’être revalorisé de 3,5 % à titre rétroactif : une augmentation historique.
Puis, le 28 juin 2023, le décret n° 2023-519 a annoncé une nouvelle majoration, de 1,5 %, effective le 1er juillet 2023. Depuis cette date, la valeur mensuelle du point d’indice se monte à 4,92 €, contre 4,85 € en 2022.
Cette dernière revalorisation visait, en réponse aux pressions syndicales, à permettre aux agents publics de faire face à la hausse des prix et à compenser la perte de leur pouvoir d’achat.
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Hausse du point d’indice : quel est l’impact réel sur les salaires dans le secteur public ?
Outre cette augmentation de 1,5 % de la valeur du point d’indice, le décret du 28 juin 2023 a également instauré l’attribution de 5 points d’indice majoré à compter du 1er janvier 2024 pour tous les agents publics. En pratique, cela correspond à une augmentation salariale mensuelle brute d’environ 25 € par mois et par agent.
À titre d’exemple, en 2022, une enseignante dotée d’un an d’ancienneté, avec un indice majoré de 390, à l’échelon 1, percevait un salaire brut mensuel de 390 x 4,85, soit 1 891,50 €. Aujourd’hui, sur un poste et un niveau d’ancienneté similaires, l’enseignante verra son indice majoré passer à 395. Compte tenu de la revalorisation du point d’indice à 4,92 €, son salaire brut mensuel en 2024 s’élève donc à 4,92 x 395, soit 1 943,40 €. Elle perçoit donc 51,90 € de plus par mois qu’en 2022.
En outre, le décret du 28 juin 2023 a prévu l’attribution de points d’indice majoré différenciés pour les indices bruts 367 et 418. Cela correspond à une augmentation pouvant aller jusqu’à 9 points supplémentaires, soit une hausse de 44 € brut par mois pour certains fonctionnaires. Les individus concernés sont les agents fonctionnaires positionnés sur les premiers échelons des grades de la catégorie C et des deux premiers grades de la catégorie B ; les agents contractuels rémunérés selon ces indices ainsi que les militaires, pour leur solde de début de carrière.
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Malgré la hausse du point d’indice, des salaires encore bas
Malgré les augmentations successives du point d’indice en 2022 (+3,5 %) puis en 2023 (+1,5 %), les représentants syndicaux affirment que ces majorations sont insuffisantes, car elles sont bien inférieures à l’inflation. Cette dernière s’élevait à +5,2 % en 2022 et à +4,9 % en 2023 (Source : Economie.gouv). Il est en effet indéniable, face à de tels taux, qu’une augmentation de salaire de 52 € par mois (pour reprendre le précédent exemple de la rémunération d’une enseignante) sera très vite absorbée par l’inflation.
Toutefois, il est vrai que, depuis début 2024, on remarque un ralentissement de l’inflation, qui a atteint 2,2 % en avril 2024, par rapport à l’année passée (Source : Insee). Malgré cette décrue, le contexte socio-économique reste encore fragile et incertain, notamment compte tenu de l’instabilité géopolitique actuelle. Selon la Banque de France, l’activité économique va d’ailleurs rester lente jusqu’à fin 2024, avec une croissance du PIB de +0,2 % au premier trimestre 2024. L’activité économique devrait reprendre de l’allure en 2025 et 2026 avec des projections respectives de +1,5 % et 1,7 % de croissance du PIB ces années-là.
De leur côté, les syndicats restent inflexibles. Selon eux, malgré cette hausse récente du point d’indice, les salaires dans la fonction publique sont encore trop faibles. En mars 2024, des agents publics ont d’ailleurs manifesté leur mécontentement à travers des mouvements de grève de plusieurs jours dans toute la France, en revendiquant, entre autres, une augmentation de leurs salaires. Les syndicats craignent notamment que 2024 soit une année blanche, sans aucune hausse de la valeur du point d’indice, ce qui impacterait d’autant plus le pouvoir d’achat des fonctionnaires.
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Secteur public VS secteur privé : quels écarts de salaires ?
Historiquement, il existe des inégalités salariales fortes et persistantes entre les salariés du secteur privé et du secteur public.
Selon les dernières données de l’Insee, en 2022, les salariés du secteur privé gagnaient
en moyenne 2 630 € net par mois en équivalent temps plein, contre 2 430 € net par mois dans la fonction publique, soit un écart conséquent de 200 € par mois.
Par ailleurs, d’après les statistiques de l’Insee, entre 2011 et 2021, le salaire net en équivalent temps plein a progressé d’en moyenne 4,9 % en euros constants dans le secteur privé (c’est-à-dire en valeur corrigée de l’inflation). Sur cette même décennie, le salaire net moyen en équivalent temps plein a augmenté de 2,1 % en euros constants dans la fonction publique.
Cela représente, en moyenne, une hausse annuelle de +0,4 % des salaires dans le privé, contre +0,2 % dans le secteur public. En d’autres termes, la rémunération des salariés du secteur privé augmente deux fois plus vite que celle des fonctionnaires, ce qui maintient, voire élargit cet écart salarial.
Les faibles salaires dans la fonction publique ont par ailleurs un impact direct sur l’attractivité du secteur : turn-over élevé, absentéisme, difficultés de recrutement…
Selon une récente étude du CNFPT (Conseil National de la Fonction Publique Territoriale), en 2023, plus de 6 collectivités sur 10 déclarent au moins un champ de métiers en tension. Ces défis de recrutement seraient, pour 75 % des sondés, imputables en partie à un niveau de rémunération peu attractif. Près de la moitié des collectivités territoriales estiment que ces problématiques ont un impact direct sur la qualité et sur la continuité de leurs services publics.
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Comment la SES peut-elle favoriser la revalorisation des salaires dans la fonction publique ?
Le projet de loi Sécurité économique et sociale (SES) vise à mutualiser une partie de la richesse produite par les organisations privées pour la répartir de façon égalitaire entre celles et ceux qui l’ont produite. Cela passe par une contribution sur la base d’un pourcentage des flux de trésorerie générés par l’activité. Cette contribution a ensuite vocation à être redistribuée équitablement à toutes les entreprises (y compris aux travailleurs indépendants), sous la forme d’une allocation unique, fixe et mensuelle, par emploi en équivalent temps plein.
En mutualisant de cette façon une partie de la production de la richesse, la SES va ainsi garantir à chaque salarié du secteur privé un socle de revenus inconditionnel minimum qui permettra, entre autres, de revaloriser les bas salaires et de tendre vers le plein emploi en multipliant et en diversifiant les offres.
Ce dispositif va indirectement bénéficier aux salariés du secteur public.
En effet, grâce à la mise en place d’une allocation emploi universelle financée par les entreprises elles-mêmes, l’État n’aura plus à allouer de fonds supplémentaires pour soutenir des emplois du secteur privé. Il pourra notamment mettre fin à des dispositifs qui seront alors obsolètes, tels que les exonérations de cotisations sociales, qui coûtent aujourd’hui 88 milliards d’euros aux budgets publics. Par ailleurs, le recours au RSA et à la prime d’activité sera moins fréquent, permettant ainsi d’économiser plusieurs dizaines de milliards d’euros chaque année.
Il faut savoir qu’en France, les agents de la fonction publique représentent 1 travailleur sur 5, soit 21,2 % de la population active. En 2022, la masse salariale totale de la fonction publique s’élevait à 221 milliards d’euros, hors cotisations sociales, soit 14,4 % de la dépense publique, selon les chiffres rapportés par Le Point.
Toutefois, avec un déficit public pour 2023 de 154 milliards d’euros, soit 5,5 % du PIB, (Source : Vie-publique.fr), la Cour des comptes estime qu’il faudrait réaliser 50 milliards d’euros d’économies avant 2027 pour faire descendre le déficit public sous la barre des 3 %. En avril 2024, le gouvernement a annoncé une prévision de 10 milliards d’euros d’économies sur l’année en cours, dont 800 millions d’euros sur la masse salariale de la fonction publique, et prévoit 20 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur le budget 2025.
Compte tenu de telles restrictions budgétaires, une augmentation des salaires dans le secteur public et une nouvelle hausse du point d’indice semblent donc difficilement envisageables dans un avenir proche.
Or, selon nos estimations, le dispositif SES permettra de libérer plus de 100 milliards d’euros de budgets publics. Ces fonds supplémentaires pourront alors être injectés dans la revalorisation des salaires des fonctionnaires, apportant ainsi une réponse concrète et efficace à cette problématique sociétale de longue date.
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Photo de Max Fischer: https://www.pexels.com/fr-fr/photo/enseignant-posant-une-question-a-la-classe-5212345/