En 2025, 4 Français sur 10 estiment être sous-payés et près d’un salarié sur deux (47 %) prévoit de demander une augmentation de salaire à son N+1, selon une récente étude.
Mais comment formuler une telle requête ? Quel montant demander ? Quels arguments mettre en avant auprès de son employeur ? Et que faire en cas de refus ? Dans cet article, nous faisons le point sur les étapes clés et les bonnes pratiques à connaître pour solliciter une augmentation de salaire et percevoir une rémunération à la hauteur de votre niveau de qualification.
La revalorisation des salaires en France : bilan 2025 et perspectives 2026
Selon les dernières données publiées par la Dares (Direction de l’Animation de la recherche, des Études et des Statistiques), l’indice du SMB (salaire mensuel de base) de l’ensemble des salariés a progressé de +0,3 % au cours du 3ème trimestre 2025, et de +2 % sur un an. Cette dynamique s’explique en partie par l’augmentation du SMIC, qui influence mécaniquement la base de rémunération des salaires les plus bas et peut entraîner un réajustement global des grilles salariales dans certaines entreprises.
Bien que cette hausse soit supérieure à l’inflation, qui a augmenté de + 1,1 % entre septembre 2024 et septembre 2025, elle masque un sentiment persistant de sous-valorisation chez les travailleurs.
En effet, 41 % des salariés français estiment que leur salaire n’est pas à la hauteur de la valeur réelle qu’ils apportent à l’entreprise, selon le baromètre 2025 du cabinet de recrutement Robert Half. Ce sentiment est particulièrement marqué chez les femmes, qui sont 45 % à partager ce ressenti, contre 38 % d’hommes. Cela révèle une disparité de genre qui persiste encore, avec 37 % d’hommes ayant reçu une augmentation au cours de la dernière année, contre 30 % de femmes.

→ Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre article sur les inégalités salariales femmes-hommes.
Mais au-delà des écarts de rémunération, c’est la question de la négociation salariale en elle-même qui pose problème. Ainsi, 48 % des salariés déclarent ne pas se sentir à l’aise pour négocier leurs salaires (dont 59 % de femmes et 37 % d’hommes). Autre chiffre évocateur : un tiers des salariés (33 %) estime que leur hiérarchie renvoie le sentiment que ce type de demande est malvenu.
La Directive européenne sur la transparence salariale, qui sera transposée dans le droit national d’ici juin 2026, pourrait toutefois faire bouger les lignes dans l’année à venir, et renforcer la liberté de parole autour de ce sujet, encore trop tabou.
| → À savoir : la Directive européenne sur la transparence salariale a vocation à renforcer la transparence des rémunérations et à faciliter l’identification des écarts injustifiés. Elle prévoit notamment l’obligation, pour les employeurs, de publier les écarts de rémunération femmes-hommes, d’informer les candidats sur les fourchettes salariales dès l’offre d’emploi, et de justifier toute disparité salariale. Cette réforme pourrait ainsi permettre aux salariés de disposer de données objectives et factuelles pour étayer leurs demandes d’augmentation. Sur demande du salarié, les entreprises devront notamment communiquer les niveaux de rémunération moyens pour des postes équivalents, ce qui renforcera d’autant plus le pouvoir de négociation du collaborateur lors de discussions salariales. |
En 2026, les entreprises prévoient des hausses autour de 2 % de la masse salariale, selon les chiffres rapportés par Les Échos. L’inflation, elle, est estimée à 1,3 %.
Augmentation de salaire : quel cadre légal ?
En France, aucune loi n’oblige un employeur à accorder des augmentations de salaires individuelles. Le Code du travail impose toutefois un certain nombre de mécanismes visant à garantir des salaires justes, décents et équitables :
- Les salaires ne peuvent pas être inférieurs au SMIC (Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance), ni aux minima conventionnels prévus par les conventions collectives. En cas de hausse du SMIC, l’employeur est dans l’obligation de réajuster les salaires inférieurs ou trop proches pour maintenir le respect des minima légaux. Cette vérification peut se faire aussi bien sur la base du salaire mensuel que du salaire horaire, notamment dans les secteurs appliquant un nombre d’heures variables ou des temps partiels.
- Les entreprises de plus de 50 salariés sont tenues d’organiser des négociations annuelles obligatoires (NAO). Elles portent toutefois sur la rémunération collective et n’imposent aucune augmentation individuelle.
- Selon le principe d’égalité de traitement inscrit dans le Code du travail, « à travail égal, salaire égal ». Cela signifie qu’à compétences, ancienneté et responsabilités équivalentes, le salaire doit être comparable. Ainsi, en cas d’écart salarial injustifié entre deux collègues aux profils similaires et occupant un même poste, le collaborateur le moins bien rémunéré est en droit de contester cette inégalité salariale.
La convention collective applicable à votre entreprise peut également fixer des minima plus élevés que le SMIC, des grilles salariales par niveau, ou encore des dispositifs automatiques de réajustement selon l’ancienneté…
Pourquoi demander une augmentation de salaire ?
Demander une augmentation de salaire s’avère essentiel à partir du moment où vous constatez un écart entre votre rémunération et la réalité du marché. Une hausse de rémunération peut également être nécessaire lorsque l’inflation réduit votre pouvoir d’achat, sans que votre salaire n’évolue en conséquence.
Voici quelques exemples de situations pouvant faire l’objet d’une demande de hausse de rémunération :
- Vos missions et vos responsabilités ont évolué ;
- Vos résultats dépassent les attentes fixées ;
- Vous assumez de nouvelles fonctions managériales ;
- Votre charge de travail a augmenté ;
- Votre salaire stagne depuis plus de 12 à 18 mois ;
- Vous constatez un écart salarial injustifié avec un autre collègue sur un poste équivalent en interne ;
- Votre salaire actuel se situe bien en dessous des fourchettes de salaires en vigueur sur le marché ;
- Vous avez effectué une mobilité interne ou externe ;
- Vous exercez un métier en tension ;
- Votre salaire n’est pas à la hauteur de votre niveau de qualification, de vos responsabilités et / ou de votre ancienneté dans l’entreprise ;
- Vous effectuez régulièrement des heures supplémentaires, révélant une charge de travail supérieure à celle prévue dans votre contrat ;
- …
En outre, une revalorisation de salaire peut s’imposer si l’inflation augmente considérablement sans que votre rémunération ne suive cette tendance haussière.
Demander une augmentation de salaire est par ailleurs un signe de professionnalisme, d’engagement, et une manière d’attester et de défendre sa valeur dans l’entreprise… À condition toutefois d’effectuer cette demande dans les règles de l’art.
Comment demander une augmentation de salaire ? 5 étapes clés
Vous estimez que votre salaire ne reflète pas votre degré de qualification, votre ancienneté et / ou votre niveau de responsabilités ? Voici les 5 étapes clés à suivre pour effectuer une demande d’augmentation salariale en bonne et due forme :
1. Choisir le bon moment
Avant tout, il est important de demander son augmentation de salaire au bon moment. L’entretien annuel d’évaluation est l’opportunité privilégiée pour ce genre de requêtes. Il a en effet pour objectif de faire le point, avec votre supérieur hiérarchique, sur vos contributions et vos perspectives d’évolution dans l’entreprise.
Parmi les autres moments propices figurent notamment l’obtention d’une promotion, d’une certification professionnelle ou encore un succès individuel ayant fortement contribué aux performances de l’entreprise.
À l’inverse, évitez de formuler votre demande si l’entreprise rencontre des difficultés financières, si elle est en phase de restructuration, ou en cas de crise ou de fortes tensions en interne. Il est également conseillé d’éviter la période estivale, les fêtes de fin d’année, et les périodes où les décisionnaires sont absents. Bien évidemment, il n’est pas non plus judicieux de solliciter une révision salariale suite à une erreur ou à un échec professionnel.
En ce qui concerne la fréquence de vos demandes, il est généralement conseillé de laisser s’écouler un délai de 12 à 18 mois entre deux sollicitations.
2. Bien préparer son argumentation
Demander une hausse de salaire ne s’improvise pas ! Il est impératif de constituer un dossier solide et chiffré constitué de données illustrant vos réussites et les résultats obtenus (progression du CA généré ; gain d’efficacité ; hausse de la satisfaction client ; économies réalisées ; projets menés à terme…). Vous pouvez également rassembler des données qualitatives, telles que des feedbacks positifs mettant en valeur votre travail, des témoignages de clients ou de partenaires…
Veillez aussi à clarifier avec précision la façon dont votre poste a évolué depuis votre dernière revalorisation salariale : votre charge de travail quotidienne a-t-elle augmenté ? Avez-vous gagné en autonomie, en responsabilités et en prise de décisions ? Êtes-vous monté en compétences ? Quelles missions accomplissez-vous aujourd’hui qui ne figuraient pas dans votre fiche de poste initiale ? Votre poste s’est-il complexifié ? Avez-vous assumé un rôle de référent, de formateur ou de soutien pour votre équipe ?…
Informez-vous aussi, en amont, sur la santé financière de l’entreprise. Si elle a récemment annoncé de bons résultats, votre demande aura plus de chances d’aboutir. À l’inverse, un contexte de tensions budgétaires sera moins favorable.
3. Définir une fourchette réaliste
Pour maximiser vos chances de voir votre demande aboutir favorablement, il est primordial de définir un taux d’augmentation salariale réaliste, ni trop haut, ni trop bas. Mais quel pourcentage d’augmentation de salaire demander ?
Pour le déterminer, vous devez avant tout connaître avec précision votre valeur sur le marché et vous renseigner sur les pratiques salariales en vigueur pour votre poste, votre secteur, et dans votre ville ou région. Pour ce faire, consultez les jobboards, les réseaux sociaux professionnels, les plateformes de recrutement (Indeed, LinkedIn, Apec…), les simulateurs de salaire en ligne, ainsi que les enquêtes et baromètres de rémunération disponibles en ligne (Insee, Observatoire des Inégalités, Dares…).
Les augmentations individuelles se situent généralement entre 2 % et 10 % du salaire brut annuel. Ce taux varie en fonction du profil du salarié, de ses performances, de la date de sa dernière hausse de rémunération et des grilles de salaires de l’entreprise, entre autres. Attention également à bien distinguer l’augmentation du rattrapage salarial, qui vise à compenser un retard de rémunération par rapport au marché ou à corriger une sous-évaluation de votre poste. Il peut faire l’objet de majorations plus importantes.
Voici, à titre indicatif, les fourchettes d’augmentation de salaire en fonction des performances :

Enfin, il est conseillé de formuler une demande légèrement supérieure à votre objectif, pour disposer d’une marge de négociation en cas de contre-proposition.
4. Anticiper les objections
L’une des clés d’une négociation réussie est d’anticiper toutes les éventuelles objections de l’autre partie, et de préparer des réponses adaptées.
Voici quelques exemples d’objections courantes :
- « Le budget ne le permet pas » : dans ce cas, proposez d’étaler l’augmentation sur plusieurs mois, ou d’effectuer une réévaluation dans 6 mois.
- « Ce n’est pas le bon moment » : demandez quel sera le moment propice, et quelles conditions devront être remplies. Essayez, dans la mesure du possible, de fixer une date de réévaluation précise.
- « D’autres salariés ont formulé des demandes similaires » : recentrez rapidement l’échange sur votre cas particulier, sans laisser la porte ouverte aux comparaisons.
5. Formuler sa demande dans les règles de l’art
Votre demande d’augmentation de salaire doit être adressée à votre manager direct, sauf si ce dernier vous renvoie à un autre référent. Commencez par lui envoyer un mail pour solliciter un rendez-vous formel (en présentiel de préférence) afin d’échanger sur votre évolution professionnelle et sur votre rémunération.
Pendant l’échange, adoptez une posture assertive, professionnelle et faites preuve d’assurance dans votre communication verbale et non verbale. Attention toutefois à ne pas revendiquer de façon trop péremptoire. L’objectif est plutôt de démontrer, avec diplomatie, que votre rémunération actuelle ne reflète pas votre valeur réelle ni vos efforts.
Préparez votre discours en structurant votre argumentaire en 3 parties :
- Rappelez votre contribution à l’entreprise ainsi que votre engagement ;
- Démontrez votre valeur ajoutée avec des exemples concrets et des chiffres à l’appui ;
- Formulez votre demande de façon claire et assurée, avec une fourchette raisonnable déterminée en amont.
N’hésitez pas à réciter ce pitch à l’oral plusieurs fois pour vous entraîner (visez entre 2 à 3 minutes de prise de parole maximum).
Si votre demande fait l’objet d’une réponse positive, demandez un engagement écrit faisant mention du montant, de la date d’effet et des modalités. En cas d’acceptation partielle ou ajournée, convenez d’une date de retour avec votre manager.
Revalorisation de salaire : que faire en cas de refus ?
Malgré les différents dispositifs visant à encadrer les pratiques salariales, l’augmentation individuelle de rémunération repose, in fine, sur l’appréciation de l’employeur, qui est en droit de refuser la demande du salarié.
Si tel est votre cas, plusieurs options s’offrent à vous. Vous pouvez par exemple :
- Demander à votre manager un retour transparent sur les conditions qui permettraient d’envisager une revalorisation ultérieure (montée en compétences, résultats à atteindre,…).
- Négocier une réévaluation dans 6 mois, en clarifiant les critères qui devront être réunis pour vous permettre de l’obtenir.
- Envisager de négocier des primes sur objectifs, un budget formation, des avantages en nature (télétravail, véhicule de fonction, tickets restaurant…) ou encore des jours de congés supplémentaires.
- Interroger votre manager sur les opportunités de mobilité interne vers des postes mieux valorisés.
- Réfléchir à une éventuelle recherche d’emploi, si les refus se répètent et ne laissent pas entrevoir de perspectives d’évolution à moyen ou long terme au sein de votre organisation.
- Selon votre situation, vous pouvez également vérifier votre éligibilité à la prime d’activité, un complément de revenus versé par la CAF pour soutenir les travailleurs aux revenus modestes.
Revalorisation de salaire : les entreprises ont-elles encore des marges de manœuvre ?
Il est également important de comprendre que, très souvent, un refus d’augmentation de salaire traduit des failles plus profondes, qui vont bien au-delà du simple bon vouloir de l’employeur. C’est, très souvent, le reflet d’un modèle économique en berne, qui souffre d’un véritable déséquilibre systémique.
En effet, dans certains secteurs pourtant essentiels, comme l’aide à la personne, le social, le médico-social ou la petite enfance, les marges sont parfois si faibles que les entreprises peinent à proposer des salaires décents malgré des conditions de travail souvent difficiles.
Dans le secteur public également, de nombreux fonctionnaires (enseignants, soignants, agents territoriaux…) souffrent de rémunérations trop faibles au regard de la pénibilité de leur métier et des enjeux d’utilité sociale qui s’y rattachent.
La Sécurité Économique et Sociale : un nouveau levier pour la revalorisation des salaires
C’est précisément pour corriger ces disparités que le projet de loi Sécurité Économique et Sociale est né. Ce dispositif innovant prévoit de collecter, dans une caisse commune, une fraction des richesses produites par les entreprises, afin de la redistribuer à parts égales à l’ensemble des acteurs économiques (travailleurs indépendants, TPE, PME, grandes entreprises…). Cette redistribution prendra la forme d’une allocation unique, fixe et mensuelle par emploi en équivalent temps plein. Cette allocation sera donc exclusivement financée par les entreprises elles-mêmes, via une contribution proportionnelle à leur chiffre d’affaires.
Par le biais de ce mécanisme, les entreprises gagneront de la marge de manœuvre dans leur politique salariale. Elles pourront plus facilement revaloriser les métiers essentiels dont les salaires stagnent depuis des années, réduire les écarts de rémunération et favoriser le plein emploi.
Les salariés du privé seront ainsi moins dépendants de la santé financière de leur seule entreprise, et davantage de la richesse collective produite au niveau national.
Côté public, la SES permettra de réaliser des économies considérables estimées à plus de 100 milliards d’euros par an. En effet, l’État n’aura plus besoin de mobiliser autant de fonds pour soutenir l’emploi dans le secteur privé, et des dispositifs tels que les exonérations de cotisations sociales (qui coûtent 88 milliards d’euros aux finances publiques), pourront être supprimés. Une partie de ces nouvelles ressources pourra alors être allouée à la revalorisation des métiers les moins bien payés dans le secteur public.
Ainsi, bien que le projet de loi SES n’ait pas vocation à se substituer aux augmentations individuelles, il favorisera l’émergence de politiques salariales plus justes et plus équitables, en libérant des marges de manœuvre considérables.
En savoir plus sur le fonctionnement du projet de loi SES
Questions fréquentes
- Je suis en période d’essai ou en CDD, puis-je demander une augmentation de salaire ?
La période d’essai est très peu propice à une demande d’augmentation de salaire, sauf si une revalorisation salariale a été explicitement prévue lors du recrutement. En CDD (contrat à durée déterminée), une négociation reste possible lors d’un renouvellement ou d’une proposition de CDI, mais rarement en cours de contrat.
- Que faire si mon manager me dit que ce n’est pas lui qui décide des revalorisations de salaires ?
Si votre manager vous explique ne pas avoir l’autorité hiérarchique nécessaire pour vous accorder une augmentation de salaire, demandez à rencontrer le décisionnaire approprié, avec ou sans votre manager. Veillez à bien clarifier le processus de décision dans votre entreprise et à adapter votre approche en conséquence. En outre, si vous exercez au sein d’une grande entreprise ou bien dans un groupe, n’hésitez pas à vous tourner vers le service des ressources humaines pour connaître la marche à suivre.
- Puis-je mentir sur une offre d’un concurrent pour négocier mon salaire ?
Cela est très fortement déconseillé. En effet, au-delà de l’aspect éthique, ce point peut être vérifié en aval, ce qui nuirait automatiquement à votre crédibilité et à votre professionnalisme. En revanche, si une offre réelle avec un salaire plus attractif vous a été proposée, il est tout à fait légitime d’en parler, avec tact, pour argumenter votre demande d’augmentation de salaire.
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